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09/11/2012

Ordre ou désordre, moral ou amoral ?

On a peine à croire qu'en 2002 à la même époque l'on était, à entendre certains dans les médias, en train de vivre un «retour à l’ordre moral». Mais au fait, qu'est-ce que «l’ordre moral» ? Voilà en effet une formule qui fait trembler sans réelle raison. Mêlant leurs propres fantasmes à des idéologies à peine voilées, des libertaires y allaient de leur refrain, sûrs qu'il serait repris par les "bien-pensants", toujours prompts à hurler avec les loups contre toute mesure «liberticide».

L'expression «Ordre moral» date en fait de son instauration en 1873 au début de la Troisième République, par le maréchal de Mac-Mahon et le duc de Broglie. Cette politique «conservatrice, antirépublicaine et cléricale» se caractérisait par «l'épuration de l'administration et le renvoi de maires républicains». Sans oublier les pèlerinages officiels des députés conservateurs (cf. Histoire de France, au Seuil).

Pierre Miquel dans son Histoire de la France, de Vercingétorix à Charles de Gaulle chez Marabout, précise qu'«Il s'agissait de rétablir Dieu dans l'Etat, dans la cité, dans la famille (...). Les enterrements civils étaient interdits de jour. Les débits de boisson, ces antres du radicalisme rural, étaient soumis à une stricte surveillance. Les journaux républicains (...) étaient interdits à la criée».

«Les assomptionnistes et les autres ordres religieux (...) multipliaient les processions, plantaient solennellement des croix dans les villages (...).» Etc. Finalement, la restauration échouera, la République triomphera et le socialisme progressera avec les suites que l'on sait. Reconnaissons que l'on est loin de la situation de 1873 et qu'aujourd'hui, l'on en serait plutôt à déboulonner les croix.

Le «retour à l’ordre moral» n'est donc pas pour demain. L'on vit au contraire une époque d'inversion des valeurs, où ce qui était beau, bien, vrai... ne l'est plus pour une part. Les "bons principes" et Dieu n'y ont plus leur place. La morale et l'ordre y sont relatifs, la permissivité quasi absolue. La société de consommation approuvant cette amoralité bien arrangeante puisqu'autorisant tous les commerces.

La conclusion (ironique) revient au magazine Marianne. «Ordre moral : système oppressif qui caractérise une société où les films porno sont diffusés à la télévision, où les sex-shops sont plus nombreux que les librairies, où les récits d'orgasmes se transforment mécaniquement en succès littéraire, où les amours dans une piscine sont programmées en prime time et où Bouvard anime "Les grosses têtes".»

11/09/2012

Exceptionnel ! Profitez-en !

Avez-vous remarqué que tout était exceptionnel de nos jours ? Je vous passe les prix exceptionnels et autres offres ou remises exceptionnelles qui se répètent à longueur d'année. Pratique commerciale bien connue qui consiste à nous faire croire que la soi-disant promotion chargée de réduire les stocks ne se reproduira pas de si tôt et qu'il faut en profiter - l'autre grande expression de notre société de consommation - c'est-à-dire acheter même si ce n'est pas nécessaire.

Plus inquiétante est l'extension de ce "marketing à la petite semaine". La télévision vend ses émissions exceptionnelles, les agences immobilières des situations exceptionnelles, la météo des conditions exceptionnelles, les experts des circonstances exceptionnelles, le gouvernement des mesures exceptionnelles, les magazines des réussites exceptionnelles, etc. Sans parler de l'exception française.

Exceptionnel est un mot magique qui permet de vendre tout et surtout n'importe quoi. Le mot attire ou rassure suivant le cas. Si un événement est exceptionnel, c'est soit qu'il est intéressant, avantageux et il s'agit de saisir l'occasion, soit qu'il est rarissime, extraordinaire et il s'agit de se tranquilliser en soulignant son caractère accidentel.

L'on nous exhorte ainsi à croire que l'exception confirme la règle dans ce sens qu'il n'y aurait pas d'exception s'il n'y avait pas de règle. Mais si les conventions faisaient qu'il n'y avait pas ou plus de règle absolue, de règle sans exception. Si la règle était de faire exception. Et si l'exception devenait la règle. La relativisation, la banalisation, la généralisation, voilà ce qui guette l'exception. Et tout à coup, ce qui était exceptionnel devient régulier, habituel et finalement normal.

Certains médias ne sont pas étrangers à ce processus de normalisation. Par leur volonté de sortir de l'ordinaire voire d'influer sur les opinions et les comportements, ils focalisent sur ce qui est original, remarquable, insolite, mais aussi sur ce qui est marginal, déviant, extrême. A vouloir vendre de l'exceptionnel pour ne pas dire du sensationnel à tout prix, le risque est de faire de l'information un produit de consommation courante dont le lecteur-auditeur-téléspectateur-voyeur ne tire en définitive aucun profit.

Mais si l’on ne vend pas de journaux en parlant des trains qui arrivent à l’heure, rassurons-nous en nous disant que leur ponctualité pourrait devenir exceptionnelle. En attendant, il vous reste ce blog exceptionnel ; profitez-en et bonne lecture !